Publié par Lukyan
« Les plaisirs de la porte »
Les rois ne touchent pas aux portes.
Ils ne connaissent pas ce bonheur : pousser devant soi avec douceur ou rudesse l'un de ces grands panneaux familiers, se retourner vers lui pour le remettre en place, - tenir dans ses bras une porte.
Le bonheur d'empoigner au ventre par son nœud de porcelaine l'un de ces hauts obstacles d'une pièce ; ce corps à corps rapide par lequel un instant la marche retenue, l'œil s'ouvre et le corps tout entier s'accommode à son nouvel appartement.
D'une main amicale il la retient encore, avant de la repousser décidément et s'enclore, - ce dont le déclic du ressort puissant mais bien huilé agréablement l'assure.
Francis Ponge, Le Parti pris des choses (1942)
© Lukyan
LES JOIES DE LA CLÉ
Instrument en métal, petit levier,
Servant à ouvrir tous les barillets
Ou encore fermer une maison,
Aussi la cellule d'une prison.
Petit anneau, tige et panneton
Arrivent à bout de tout portillon.
Seule ou faisant partie d'un trousseau,
On la trouve accrochée au tableau.
Clé de sol en début de partition,
Prélude de la chanson « Tourbillon »,
Clé USB, codée ou même brevetée,
Est synonyme de sécurité.
Plate, anglaise : clés de serrage,
Ou à molette, bel outillage !
Avoir un passe est une chance,
Car c'est symbole d'indépendance.
La clé ou la clef : les deux se disent,
Pour tous, c'est l'objet de convoitise,
Qui peut être signe de propriété,
Et surtout fait rêver de Liberté !