Publié par Nathan E.
Rendons d'abord l'atmosphère à la fois brumeuse et sèche, échevelée, où la cigarette est toujours posée de travers depuis que continûment elle la crée. Puis sa personne : une petite torche beaucoup moins lumineuse que parfumée, d'où se détachent et choient selon un rythme à déterminer un nombre calculable de petites masses de cendres. Sa passion enfin : ce bouton embrasé, desquamant en pellicules argentées, qu'un manchon immédiat formé des plus récentes entoure.
Francis Ponge, « La cigarette », Le parti pris des choses (1942)
La machine à tintamarre © Nathan E.
Silencieuse, placée dans une pièce isolée, elle attend d’être nourrie. Puis à la pression d’un bouton – tous craignent son cri, un long et bruyant bruit, qui fatigue les oreilles – elle démarre son tintamarre. Après de nombreux tonneaux, les linges souillés finissent dégoulinants et propres. Cet objet rectangulaire, dont la bouche et ronde et creuse, change le sec en mouillé et le sale en propre. Ainsi, voisine du sèche-linge, la machine lui donne ses vêtements à la fin de son travail. Or, la machine ne peut avaler quelques aliments, comme la soie et le cuir ou comme les tissus de couleurs différentes. Cependant, elle a besoin d’être accompagnée par de la lessive, comme un produit magique, liquide ou en poudre, pour donner un doux parfum à sa nourriture. C’est alors que cette travailleuse en métal et plastique se repose, immobile. Puis elle recommencera, bruyante et répétitive, dans la pièce sombre et glaciale.