Publié par Emma T. & Savannah

Maman, une dernière fois...

Mon verre de vin à la main, une cigarette entre les doigts : je décide de te parler un dernière fois.

C’est important.


 

             Maman, j’ai reçu un télégramme de l’asile de Marengo m’apprenant ton décès. Devant cette lettre je n’ai eu aucune réaction… “Mère décédée. Enterrement demain; Sentiments distingués.” Je n’ai pensé qu’à prendre deux jours de congé, et à mon trajet pour te rejoindre pour la veillée et l’enterrement. 

 

             Aujourd’hui, je suis allé demander mes jours de congé, je me suis excusé de les demander, mais je n’aurais pas dû. Peut-être que je me sens coupable de ton décès, enfin de ne pas être venu te voir plus souvent. Si tu savais combien je me sens coupable, maman je m’excuse, j’ai dû te manquer, je me suis débarrassé de toi en te mettant dans un asile. J’aurais peut-être dû te garder chez moi, et profiter de toi tant qu’il était encore temps.

Je suis allé manger chez Céleste, je paraissais sans émotion, Céleste paraissait même plus triste que moi. 

             Tu sais, pendant la veillée, j'ai rencontré tes amis... Ils avaient l'air très attachés à toi. Je faisais un peu pâle figure au milieu du consensus des affects. Tout le monde était triste pour moi, pour toi. Les murs étaient très blancs.

             L'endroit était plus ou moins calme, je ne me sentais pas à ma place. Parfois je me demande ce que j’aurais pu faire pour éviter ça, mais après tout, y penser ne me faisait que me rendre encore plus morose. A un moment l'endroit me rappelait chez nous, notre maison,  banale, mais c'était la nôtre. Après c'était ton enterrement. J'étais si fatigué. L'émotion me manquait, et le soleil tapait vraiment fort. J'ai aussi rencontré ton ami. Je ne le connaissais pas. On m’a parlé de votre histoire, c'était très touchant et intéressant à entendre que, même éloigné de moi, tu t'étais attachée à un autre. Cela aurait pu me faire sourire, de joie peut-être, mais bon. Tu sais, j'ai reçu beaucoup de commentaires de gens qui ne me comprenaient pas, ou plutôt pensaient savoir mieux que moi comment je devais me sentir face à ta mort, c'était déconcertant. Les gens autour de moi, malgré l'événement, se tenaient avec dignité et calme, je ne pouvais pas toujours en dire autant de moi-même. J’étais gêné, parfois. Je ne sais plus pourquoi.

             J’ai décidé de venir te voir une fois par mois au cimetière, ça ne va pas rattraper mon absence, mais si je peux essayer d’être plus présent. 

             Maman je suis désolé. 

            Je t’aime. 

Maman, une dernière fois...
Tag(s) : #l'étranger
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