Publié par Alix

« Les affaires d’argent bientôt recommencèrent, M. Lheureux excitant de nouveau son ami Vinçart » L.6 à 7 p.426

« Alors chacun se mit à profiter. Mlle Lempereur réclama six mois de leçons, bien qu’Emma n’en eût jamais pris une seule (malgré cette facture acquittée qu’elle avait fait voir à Bovary) » L.12 à 14 p.426

« La mère Rolet réclama le port d’une vingtaine de lettres » L.16 à 17 p.426 

« Charles s’engagea pour des sommes exorbitantes ; car jamais il ne voulut consentir à laisser vendre le moindre des meubles qui lui avaient appartenu. Sa mère en fut exaspérée. Il s’indigna plus fort qu’elle. Il avait changé tout à fait. Elle abandonna la maison. » L.7 à 11 p.426

« Un jour qu’errant sans but dans la maison, il était monté jusqu’au grenier, il sentit sous sa pantoufle une boulette de papier fin. Il l’ouvrit et il lut : « Du courage, Emma ! du courage ! Je ne veux pas faire le malheur de votre existence. » C’était la lettre de Rodolphe » L.37 à 40 p.427

« Enfin, il découvrit un petit R au bas de la seconde page. Qu’était-ce ? Il se rappela les assiduités de Rodolphe, sa disparition soudaine et l’air contraint qu’il avait eu en le rencontrant depuis, deux ou trois fois. Mais le ton respectueux de la lettre l’illusionna. » L.44 à 48 p.427

« - Ils se sont peut-être aimés platoniquement, se dit-il. » L.59 p.427

« Charles n’avait pas encore ouvert le compartiment secret d’un bureau de palissandre dont Emma se servait habituellement. Un jour, enfin, il s’assit devant, tourna la clef et poussa le ressort. Toutes les lettres de Léon s’y trouvaient. Plus de doute, cette fois ! Il dévora jusqu’à la dernière, fouilla dans tous les coins, tous les meubles, tous les tiroirs, derrière les murs, sanglotant, hurlant, éperdu, fou. Il découvrit une boîte, la défonça d’un coup de pied. Le portrait de Rodolphe lui sauta en plein visage, au milieu des billets doux bouleversés. » L.214 à 222 p.433

« Félicité portait maintenant les robes de Madame ; non pas toutes, car il en avait gardé quelques-unes, et il les allait voir dans son cabinet de toilette, où il s’enfermait ; elle était à peu près de sa taille, souvent Charles, en l’apercevant par derrière, était saisi d’une illusion, et s’écriait : - Oh ! reste ! reste ! »  L.24 à 29 p.427

« Chaque nuit pourtant, il la rêvait » L.161 p.431.

                               Madame Bovary de Gustave Flaubert, partie III, chapitre 11

  Les citations sont placées par ordre d'apparition des évènements dans le texte ci-dessous.  

© A.M.

© A.M.

Ma douce Emma,

je ne comprends pas pourquoi vous avez fait cela. Nous avions une belle vie pourtant. Nous avions organisé un magnifique mariage avec de nombreux invités, ensuite je me suis ruiné pour vous payer une lune de miel modeste mais belle. Je suis désespéré ma dulcinée, expliquez-moi ! Expliquez ce départ si prompt ! Qu'est-ce que j’ai gâché dans notre amour intense ? Vous étiez si épanouie, vous m’aviez donné une belle petite-fille, Berthe pauvre enfant que va-t-elle faire sans vous ?

M. Lheureux et M. Vinçart me réclament des sommes astronomiques et relancent de plus en plus les huissiers qui me menacent de saisir tous nos biens. Mlle Lempereur exige que je lui paye six mois de leçons manquées. J’ai découvert que vous n’alliez point aux leçons de piano dont nous avions convenu. Je croyais que vous les aviez payées.

Que faisiez-vous à la place ? Vous aviez l’air si heureuse de pouvoir aller à ces leçons. Puis Mme Rolet en a profité pour me faire payer la somme que vous aviez empruntée pour le port d’une vingtaine de lettres. Pourquoi ne m’aviez-vous donc pas parler de cet endettement ? On aurait financé cela tous les deux, cela m’aurait évité de m’engager pour des sommes exorbitantes ! Plus je rembourse de dettes plus il y en a, je suis débordé ! Bientôt je n’aurai plus de meubles, plus d’argent et la dépression me gagne résolument.

En outre, ma mère ne veut plus me voir ni me parler et puis Berthe qui est persuadée que vous reviendrez lui apporter des joujoux, je n’en puis plus !

Un jour, j’errais dans la maison sans but précis et je suis allé dans le grenier, j’ai marché sur un papier froissé. Je suis tombé des nues quand j’ai découvert ce qu’il contenait, une lettre de Rodolphe, celui qui vous avait donné un magnifique cheval ! C’était donc pour vous amadouer, vous faire tomber dans ses bras ! Cela explique les nombreuses balades sans moi ! Quel idiot je suis, moi qui lui faisais confiance ! Je ne comprends pas, qu’est-ce que cet homme a de plus que moi ?

J’ai essayé de faire de vous une femme comblée, je vous ai acheté tout ce que vous vouliez et vous, vous vous donniez à lui ! Qu’est-ce que j’ai fait pour ne pas mériter votre amour ?

Je vous pardonne de toute façon, vu comment il vous parlait dans cette lettre, cela devait n’être qu’un amour platonique.

Puis j’ai remarqué le bureau en palissandre dont vous m’interdisiez l’accès, je me suis alors dit que je pouvais y jeter un œil, après tout vous n’êtes plus là, et vous ne m’en voudriez pas de savoir maintenant ce que vous m’aviez toujours caché. J’y ai trouvé une vingtaine de lettres d’où la réclamation de Mme Rolet. Je me suis permis de les ouvrir, j’ai manqué de faire une syncope quand j’ai appris à qui elles étaient adressées ! Il y en avait de Rodolphe mais les autres étaient pour Léon ! Pourquoi lui ? J’ai placé toute mon espérance en notre relation. Ce qui élucide pourquoi vous n’alliez point aux leçons de piano !

Que je suis sot, moi qui croyais que vous étiez si heureuse d’apprendre la nouvelle de son mariage. N’étiez-vous pas bien avec moi ? Ne vous ai-je pas assez gâtée ? Et notre enfant, y aviez-vous pensé ? Qu’est-ce qu’elle penserait de vous si elle l’apprenait ?

Mon cœur souffre Emma, le comprenez-vous ? Après tant d’années d’union m’avoir trahi ainsi ! Je suis anéanti mais je vous pardonne, je vous aime et jamais je ne pourrai faire cesser cet amour !

De jour en jour, votre absence m’est de plus en plus pesante. J’arrive au point de vous confondre avec Félicité qui désormais porte vos robes. Je me sens partir tout doucement. J’ai perdu le goût de vivre, je n’ai plus soif, je n’ai jamais faim. La joie de notre fille me fait sombrer encore plus dans le désespoir. Je rêve de vous, j’en deviens fou à force de croire vous voir errer dans la maison à présent silencieuse. Vos douces mélodies au piano me manquent et votre voix, avec laquelle vous prononciez « je vous aime », avec une candeur indescriptible, et vos portraits maintenant recouverts d’un drap noir… Les cordons verts sont changés pour des noirs. Jamais je ne vous oublierai, jusqu’à mon dernier souffle un portrait de vous restera ancré dans ma mémoire. Je vais bientôt vous rejoindre Emma comme cela nous vivrons tous deux au milieu des étoiles.

Je vous ai aimée et je vous aimerai toujours,

Votre dévoué mari, Charles Bovary

 

Tag(s) : #madame bovary, #S4
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